La liquidation des Israéliens au lendemain de la victoire: le plan du Hamas

Le Hamas vient de tenir (le 30 septembre) une conférence très officielle et très sérieuse « La promesse de l’autre monde », « [1] sous l’égide de l’Institut de l’autre monde (je traduis ici l’anglais « Hereafter » qui pourrait signifier la « fin du monde ») à laquelle les officiels du mouvement terroriste et d’autres faction palestiniennes ont assisté. Elle a été organisée dans l’idée que nous serions proches de l’effondrement de l’Etat d’Israël depuis que le Hamas a mené  sa dernière opération, « Epée de Jérusalem » qu’il a mené à Jérusalem » durant l’opération israélienne « Guardien des murailles » en mai 2021.

 

En vue de la proche victoire qui verra la libération de la Palestine, le colloque vise à préparer les Palestiniens à la prise de possession de l’Etat d’Israël et à la façon de dominer la population juive afin d’y établir l' »Etat de Palestine ». Il met au point à cette fin « des idées et méthodes d’opération devant être appliquées durant la libération de la Palestine » et qui donneront un mode d’emploi au futur « Conseil de la libération de Palestine » qui fera office d’Etat durant la période de transition. Je négligerais ici les dispositifs soi disant juridiques et internationaux que recense le Hamas de façon très « sérieuse » et « responsable » pour asseoir l’Etat projeté et je mettrais l’accent sur ce qui  prévoit pour « les Juifs ».

 

La charte de la dhimmitude

Remarquons tout d’abord que la Déclaration d’indépendance sera une « continuation directe » du Pacte d’Omar Bin al Hattab qui fut passé avec l’évèque Sophronius, le patriarche chrétien  de la ville, en 638, lors de l’invasion arabe de Jérusalem, alors que la ville était sous la gouverne de l’empire byzantin et il évoque aussi  la déclaration de Saladin  lors de la « libération de la Mosquée d’El Aksa » contre les Croisés (en 1187) qui autorisait chrétiens et Juifs à vivre à Jérusalem mais sous le poids de la charya, c’est à dire confomément au  code juridique du statut et du destin du non musulman.

 

Ce rappel ne laisse aucun doute sur le statut de dhimmi, de paria,  qui sera imposé aux Juifs (et aux Arabes palestiniens chrétiens).

 

Nul doute aussi concernant le caractère arabe et islamique, en plus de palestinien, de la nouvelle conquête à laquelle se prépare le Hamas. « La bataille de la fin des temps sera bien plus grande que l’opération « Epée de Jerusalem ». La victoire annoncée, en effet, seraient promise par Allah et déjà annoncée (point 20 de la Déclaration) par le Coran ( 47,20 et 17, 51) ! La fin de l’entité sioniste serait ainsi mentionnée dans le Coran de façon certaine. « La disparition d’Israël sera un événement historique sans précédent au niveau régional et global, aux ramifications mondiales » (Kanaan Obed).

 

Que faire des Juifs?

Quel sera le sort des « occupants » juifs (un terme qui  concerne tous les Juifs du Jourdain à la mer). Le document sélectionne la populations israélienne pour fixer ceux qui sera tué, retenu en otage, chassé, etc

Dans le Point 15 de la conclusion du colloque, la distinction est faite entre:

-le « combattant », le soldat qui doit être tué

le fuyard qui peut survivre ou être poursuivi pour ses crimes en justice (sic!)

le Juif pacifique, qui s’est rendu et qui pourra soit être intégré (dans le nouvel Etat) soit avoir du temps pour quitter le pays

 

« C’est une question qui exige une délibération approfondie et l’exercice de l’humanisme qui a toujours caractérisé l’islam »…

 

-Par contre toute autre sera la condition des professionnels juifs

« Les Juifs éduqués et les experts en médecine, ingénierie, technologie, industriels civils et militaires », resteront  en Palestine pour quelque temps, interdits de départ car ils emporteraient avec eux des savoir faire qu’ils ont acquis en vivant dans notre Pays dont ils ont bénéficié de la « bonté » (Point 16)

 

Le président de la conférence, Kanaan Obed, déclare que le Hamas possède un registre des appartements et institutions israéliennes, éducatives, écoles, stations d’essence, usines électriques et système d’égouts: « nous devons être prêts à les administrer ».

Dès le moment où Israël s’effondrera, l’appareil de sécurité de transition devra avoir en mains toutes les données concernant les agents de l’occupation, dans la région et dans le monde, les noms des recruteurs juifs et non juifs. Sur la base de cette information « nous pourrons purger la Palestine et la patrie arabe et islamique de la fange hypocrite qui a étendu la corruption dans le pays.

Cette information importante nous permettra de poursuivre les criminels en fuite qui ont massacré notre peuple. (Point 18)

 

Bien évidement un processus est prévu pour le retour des réfugiés et leur installation dans le pays. Des dispositions institutionnelles et économiques sont prévues. Le conseil est même donné de se débarasser déjà de la monnaie israélienne qui ne vaudra plus rien…

 

L’échec de la stratégie israélienne des dernières années

Ces discours révèlent tout d’abord le côté massacreur des intentions du Hamas et surtout à quel point est erroné le choix israélien de ne pas le vaincre le Hamas  et de le laisser gérer le territoire, même au prix d’une guerre (mais, uniquement aérienne, « théorique ») tous les deux ans. Echec aussi du retrait unilatéral voulu par Sharon. Toute tentative de compromis est interprétée comme une faiblesse appelant à une guerre encore plus forte. Kanaan Obeid l’exprime parfaitement. « Quand nous avons libéré Gaza de l’occupation en 2005, ce fut une expérience de libération et nous avons appris une leçon, particulièrement quand les ressources des établissments israéliens abandonnés furent perdues, nous nous sommes dit qu’on ne peut éviter l’établissement d’une institution qui aura pour tâche de préparer et tracer les plans de l’étape qui suivra la libération ».

 

Le document du Hamas montre clairement que derrière les accoutrements d’une guerre de résistance contre le colonialisme, d’une guerre nationaliste, d’une guerre de civils aux mains nues, une simagrée destinée aux « idiots utiles » du « progressisme occidental, nous sommes face à une guerre de religion, sûre de sa cause divine, peu soucieuse de ses civils et d’enjeux humanitaires.

Tant que le leadership israélien n »aura pas accepté cette réalité sa stratégie sera défaillante.

[1] Cet article se fonde sur une synthèse de la recherche que vient de publier en anglais l’Institut de recherche sur le Moyen Orient (Memri)

Professeur émérite des universités, directeur de Dialogia, fondateur de l'Université populaire du judaïsme et de la revue d'études juives Pardès. Derniers livres parus Le nouvel État juif, Berg international, 2015, L'Odyssée de l'Etre, Hermann Philosophie, 2020; en hébreu HaMedina Hayehudit, Editions Carmel 2020, Haideologia Hashaletet Hahadasha, Hapostmodernizm, Editions Carmel, 2020.